Faire Tiers-Lieux – retour en 3 phrases sur un événement mobilisateur

Faire tiers-lieux à Metz

Nous participions les 17, 18 et 19 octobre à l’événement Faire Tiers-Lieux à Metz. La Cordée participe à la dynamique de France Tiers-Lieux depuis le début. Nous trouvons évident de nous inscrire dans tous les collectifs permettant de faire grandir notre vision des communautés : ouvertes, conviviales et actives dans l’entraide.

L’événement était pour nous l’occasion de retrouver des amis et confrères avec qui partager nos envies et nos projets. C’était aussi un moyen de rencontrer de nouvelles têtes pour interroger nos croyances et remonter la piste de nos différences. Surtout, nous avons pris le temps d’un pas de côté pour réfléchir ensemble aux chemins parcourus et à l’avenir que nous pouvons dessiner.

Trois phrases m’ont particulièrement marqué.

“La création de lien social, c’est l’un des premiers chantiers de l’adaptation au dérèglement climatique”

Akira Lavault, Maison Glaz

L’urgence est là, connue, chaque jour plus grave que la veille. C’est une montagne de problèmes face à laquelle il est normal de se sentir seul et démuni. Pour sortir de la paralysie, un premier pas est d’aller vers l’autre. En se connectant, on se met en action ; l’enthousiasme ambiant cimente, contagieux, notre propre résolution.

Ainsi, les tiers-lieux sont des lieux de vie où cette connexion à autrui s’exerce au quotidien. Les temps conviviaux nous invitent à partager nos ressentis : nos réussites et nos échecs, nos coups de cœur et nos coups de gueule y compris sur une actualité qui nous interroge, parfois avec anxiété. Partager nos réactions initie une discussion, une écoute de l’autre et une curiosité pour les solutions dans lesquelles s’engager. Changer de comportement avec le soutien de son entourage est alors un premier pas vers une prise de conscience généralisée des ruptures à provoquer.

“On ne peut pas faire dépendre le système du fait que les gens soient sympas”

Yoann Duriaux, TiLiOS 

Le mouvement des tiers-lieux est très composite : il y a des associations, des entreprises, des collectifs informels, des collectivités… Indépendamment du statut juridique des lieux, leur gouvernance peut être très inclusive ou resserrée. Certains sont complètement insérés dans l’économie marchande, d’autres revendiquent de s’en extirper. Dans ces conditions, faire cause commune par l’intermédiaire d’une structure nationale comme France Tiers-Lieux s’avère un pari ambitieux.

Deux injonctions semblent contradictoires. D’un côté, “il faut tous s’y mettre” : c’est l’appel à la mobilisation générale des personnes où qu’elles soient pour répondre aux défis du moment. De l’autre, “le vrai problème c’est le capitalisme/l’État/[renseignez ici votre ennemi à condamner]” : nous sommes insérés dans des systèmes qui changent difficilement et tendent à neutraliser celles et ceux avec la force de les confronter.

Une coalition des bonnes volontés est-elle souhaitable pour faire changer les choses ? Je pense que oui, si les personnes sont sincères, transparentes sur leurs intentions et réellement capables d’agir au sein de leurs structures.

Plus de coopération veut-il dire que les choix que nous ferons seront satisfaisants pour tous les acteurs du mouvement ? Non, il y a des sujets de désaccord sur lesquels trancher puis faire pression collectivement. Le travail, le foncier, la fiscalité, les modalités de participation citoyenne – pour ne prendre qu’eux – sont par exemple au cœur de nos débats.

Notre enjeu, c’est de mieux vivre ensemble tout en décidant avec légitimité des changements que nous voulons porter.

“J’espère que dans 5 ans on ne sera plus dans la survie et qu’on aura gardé l’enthousiasme”

Ophélie Deyrolle, le Wip

De l’ambition, beaucoup ! Mais aussi de l’humilité. Les fondations des tiers-lieux sont globalement fragiles et méritent de ne pas être oubliées. À trop parler d’avenir, on en oublie parfois les obstacles du présent :

  • La pérennité économique : mise à mal par la succession des crises et l’incertitude qui en résulte, elle est d’autant plus compliquée à assumer qu’elle nécessite souvent d’augmenter le prix des services facturés aux usagers (eux-mêmes dans une situation d’appauvrissement relatif), de diversifier davantage ses publics-cibles (avec la peur de perdre de vue sa raison d’être) ou de renforcer sa dépendance aux politiques publiques (au soutien de plus en plus conditionné). La pérennité économique est encore un tabou dans certains écosystèmes, alors que son absence a pour résultat l’épuisement humain, bénévole ou salarié.
  • La pérennité humaine : comme tous les métiers dits du “social”, nous sommes exposés à divers risques psycho-sociaux. La contrepartie d’un engagement pour l’intérêt général, c’est l’oubli récurrent de son intérêt particulier, voire sa négation au prétexte de sacrifices qu’il serait nécessaire de consentir pour le projet. La professionnalisation des tiers-lieux, souvent entendue comme leur structuration avec des emplois salariés, n’apporte qu’une réponse partielle à cela. La clef se situe aussi dans la capacité à organiser une gouvernance opérationnelle qui puisse composer avec les contraintes du monde réel – et non fantasmé.

Bien sûr, nous n’avons pas solution à tout. S’il est une chose à retenir néanmoins de l’événement qui nous a rassemblés, c’est qu’il faut oser quitter son lieu pour débattre de sa stratégie de pérennisation et la faire évoluer. S’abstraire pendant un temps des impératifs immédiats de sa communauté, c’est s’autoriser à prendre soin de soi, de son équipe et de l’ambition de long terme qui nous a fédérés.

Faire tiers-lieu dans la durée, c’est sortir de chez soi pour mieux s’y retrouver !

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