Les réflexions se sont faites en cascade, courant 2017. Après 6 ans d’existence, la Cordée avait atteint un cap : avec plus de 11 salariés, elle devait élire son délégué du personnel (le DP). En parallèle, un projet de loi était en cours d’écriture, promettant de permettre à chaque entreprise de négocier son accord d’entreprise avec le délégué du personnel. Nos contrats étaient obsolètes, notre convention collective n’avait rien à voir avec notre activité… Bref, nous nous sommes saisis de toutes ces opportunités pour tout remettre à plat !
Convention collective et code NAF
En 2011 le coworking ne disposait pas de son propre code NAF ou APE (qu’est-ce qu’un code NAF ?). Et ce n’est toujours pas le cas en 2019… Faute de mieux, nous nous étions contentés, à l’époque, du code 7733Z, “Location et location-bail de machines de bureau et de matériel informatique”. Ça nous ressemble bien, non ? …
Nous avons changé pour le code 6920B, “Location de terrains et d’autres biens immobiliers”. Toujours pas dingue, mais il y a du mieux !
De ce code NAF dépend notre convention collective. Celle dont on relève par défaut est donc devenue celle des prestataires de services du secteur tertiaire. Un peu mieux que la précédente, mais toujours de gros décalages avec notre activité : une organisation du travail très hiérarchisée, de longues parties dédiées à l’embauche d’intérimaires… Nous avons ressenti le besoin de créer un cadre légal qui soit en adéquation avec nos pratiques et valeurs : plus humain, solidaire, flexible.
Plus de doute, il nous fallait donc un accord d’entreprise à notre mesure.
De l’importance de l’accord d’entreprise
Ce dernier est conclu entre l’employeur et les représentants du personnel ou syndicaux (ou directement avec les salariés), il vise à adapter les règles générales posées par le Code du travail aux spécificités de l’entreprises : ses activités, ses valeurs, son contexte…
Ainsi, on a pu s’accorder sur des applications concrètes pour rendre ces règles plus cohérentes avec notre activité et notre raison d’être. Ce cadre légal prend désormais tout son sens en servant et respectant au mieux à la fois les protections et le bien-être des salariés, mais aussi notre entreprise et ses spécificités, donc nos clients.
Élection du délégué du personnel et travail sur l’accord d’entreprise
En juin 2017, nos effectifs nous y amenant, nous avons élu notre déléguée du personnel… et ce fut moi, Inès, avec Cécile en suppléante ! Œuvrant déjà sur la gestion du personnel et coordonnant des réflexions sur notre cadre social, j’ai trouvé particulièrement stimulant de formaliser l’existant, de co-construire un texte avec des contraintes légales fortes tout en y intégrant notre raison d’être, et de voir de nouveaux sujets passionnants émerger.
Première mission donc, attaquer (avec l’aide d’une avocate, il ne faut pas exagérer) la rédaction d’un accord d’entreprise à notre image (plus d’information légale sur l’accord d’entreprise par ici). L’idée directrice : souplesse dans l’organisation, intransigeance sur les valeurs.
Il y a eu clairement deux parties dans ce travail. Tout d’abord le travail avec l’avocate, sur tous les détails juridiques et techniques, la protection des salariés… Mais surtout, le plus intéressant, le travail avec l’équipe sur toutes les questions inhérentes à notre fonctionnement.
En particulier, nous avons travaillé :
- L’effacement des notions de dirigeant décideur de tout, d’une hiérarchie forte. Quand cela était vraiment nécessaire, nous avons utilisé le terme de “collaborateur coordinateur”.
- Le passage au forfait jour : ce dernier correspondait beaucoup plus à la logique dans laquelle nous étions de permettre à chacun de gérer son temps de travail, en prenant tout à la fois en compte ses besoins personnels et les besoins de l’entreprise.
Sur ce dernier sujet, fort conscients des dérives potentielles d’une non-détermination du temps de travail, la question de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle est gérée à part avec beaucoup d’attention : entretiens annuels pour mesurer charge de travail et charge mentale, suivi mensuel en cours de mise en place, et attention de tous portée au bien-être de chacun.
Légalement, un accord d’entreprise doit être signé par les dirigeants et le délégué du personnel. À la Cordée, il a été ratifié par l’intégralité des employés, le 23 octobre 2017 :). C’est une belle fierté, car nous sommes parvenus à écrire un accord qui nous ressemble, malgré des contraintes fortes de forme et de contenu.
Pour voir notre accord d’entreprise, ça se passe par ici.
L’occasion de réécrire nos contrats de travail
Également obsolètes, et moins soumis à des dispositions légales contraignantes, ces derniers ont aussi été réécrits.
Nous avons pu y mettre des valeurs qui nous sont chères, relatives au notions d’autonomie, de solidarité, d’éthique et de valeurs.
Nous avons tous signé nos nouveaux contrats, le 1° novembre 2017 !
Pour voir notre modèle de contrat de travail, ça se passe par là.
Le travail ne s’arrête pas là
Depuis novembre 2017, notre travail sur le cadre social à la Cordée ne s’est pas arrêté. Nous avons depuis mis en place de nouvelles actions qui sont rentrées dans l’usage :
- Maintien du salaire pour les congés maladie et maternité sans condition d’ancienneté (notamment, nous n’avons pas encore eu de congé paternité à gérer).
- Suppression de la carence pour les congés maladie et octroi de jours de congés supplémentaires pour compenser ceux non-cumulés pendant l’arrêt.
- Possibilité de faire du télétravail en lien avec des circonstances exceptionnelles.
Vivement la suite !
Vous vous posez des questions similaires dans votre entreprise ? N’hésitez pas à nous contacter, nous sommes toujours heureux de témoigner de notre expérience !
Génial. Bravo la cordée. J’ai une petite question. Si j’ai bien compris, ce sont les dernières modifications du code du travail, notamment sur les accord d’entreprise et les conventions collectives qui vous ont permis d’aboutir à ceci ?
Bonjour Elsa, et merci pour ton commentaire 🙂
En effet, ce sont les dernières ordonnances qui nous ont permis la rédaction de notre accord d’entreprise en octobre 2017, mais ce n’est pas elles qui ont défini notre politique sociale : elles nous ont offert le moyen de mieux la formaliser.
De mon point de vue, les réformes dont tu parles qui permettent de négocier des dispositions légales au sein d’une entreprise (dans un cadre très défini), sont à double tranchant : elles peuvent apporter du progrès social lorsque les intérêts et les valeurs des dirigeants et des salariés convergent (chez nous les dirigeants sont salariés), mais peuvent désavantager les salariés dans les entreprises où il n’y a pas de raison d’être commune.